Nigéria-Guinée : Brave Syli, ou mission accomplie de Dussuyer
KUWAIT CITY – La sélection guinéenne, Syli National, est en train de retrouver ses forces après une traversée de désert. Sa nouvelle ossature, composée de jeunes talents et joueurs expérimentés, est dirigée par un entraîneur français, Michel Dussuyer, ancien dernier rempart de Nice, Alès et Cannes.
Ensemble, ils forment un duo idéal.
Le Syli, qui a raté la CAN 2010, était en baisse de forme quand il a choisi Michel, son ancien entraîneur de 2002 à 2004.
Les résultats, jusqu'ici, sont le prix réconfortant du dur labeur et de l'esprit impérissable. Le Syli a refusé de mourir après avoir été dissout suite aux mauvais résultats. Michel était au chômage après avoir été limogé par le Benin, le pays qu’il venait de conduire à la CAN 2010 en Angola.
L’union entre un Syli survivant et un Michel sans boulot ne pouvait être qu’un mélange de défis à relever et valeurs à prouver.
Adjoint à Cannes (1996-2002), Michel devient sélectionneur de Guinée en 2002. Il apprendra beaucoup de cette première expérience, durant laquelle son équipe produit le football à l'état pur. Lors de la CAN 2004 en Tunisie, le Syli convainquit particulièrement par son jeu offensif. En attaquant avec deux vrais ailiers de débordement - Souleymane Youla et Fodé Mansaré – la bande composée de Titi Camara, Salam Sow, Morlaye Soumah, Pascal Feindouno, Bobo Baldé, Ibrahima Sory Conté etc…, a inscrit des buts magnifiques et émerveillé les spectateurs. Cette marque du jeu fascinant de l'équipe guinéenne était l’empreinte de Michel Dussuyer.
Sept ans plus tard, pour que le duo, Dussuyer et son (nouveau) Syli National, goute la même saveur, voire plus, ils devraient impérativement faire un bon résultat à Abuja, devant le grand Nigeria. Un challenge auquel ils se sont bien préparés avant d’y atterrir. Et après ?
Plus de 150 millions Nigérians voudraient vivre la fin de ce derby d’Abuja samedi (8 Oct. 2011) pour voir ce qu’a accompli Samson Siasia, leur arrogant coach national. Résultat : Le colosse Nigeria n’ira pas à la prochaine CAN 2012, conjointement organisée par le Gabon et la Guinée Équatoriale.
Vaincus à Conakry (1-0) avant d’être tenus en échec par les Guinéens (2-2) dans un stade archicomble d’Abuja, les supporters des Super Eagles se sont finalement rendu compte que Siasia, qui avait promis une déculottée à l’équipe guinéenne, n'est plus qu'un apprenti qui parle trop bien. ’’Notre objectif principal n'est pas de battre le Syli National de Guinée, mais de les battre stupide. ’’ répétait-il volontiers à la veille de la rencontre.
Il avait sous-estimé l’adversaire et oublié que la beauté du football c'est aussi sa glorieuse incertitude. Déçu, Siasia a baragouiné ceci après le match: ’’Nous avons tout fait... Mais parfois, le football peut-être cruel. ’’
Cruelle peut-être aussi l’hospitalité réservée aux hôtes venus arracher leur qualification sur le terrain adverse, soit-il à Kaduna, le terroir d’Amokachi ou à Enugu, le berceau d’Okocha. Mais, sachant qu’il y a dans le jeu et l’adversité ce qui indique la profondeur des sentiments ou l’envie de triompher à tout prix, les joueurs guinéens n’ont pas cédé devant les manœuvres d’intimidation (le refus du visa au coach de Guinée à l’ambassade du Nigéria à Paris, puis empêché d’entrer sur le territoire nigérian pendant plusieurs heures à l’aéroport d’Abuja, le mauvais accueil, le 2e but nigérian marqué après une faute de la main et cet interminable temps additionnel de plus de douze minutes !). Au contraire, elles les ont boostés le moral à se battre vaillamment pour y laisser leur trace.
Les Guinéens, conscients de l’enjeu, ont entamé le jeu comme s’il fallait laisser l’adversaire exposer toutes ses capacités. Le Nigeria pressait, tentait inlassablement. Le Syli défendait, sa défense et son excellent portier Naby, écartaient le danger.
À la reprise, nos pachydermes qui étaient jusque là défensifs, iront tester la défense nigériane. Leurs efforts porteront fruit à la 63’. Au départ, c’est un Pascal Feindouno dans ses beaux jours qui remue les Nigérians avant de brosser le ballon vers son ailier gauche, Ibrahima Traoré, qui décrochera. Son tir ira cogner le montant gauche du gardien nigérian, traversera les défenseurs pour finir sous les pieds d’Ismaël Bangoura qui, sans tarder, le catapultera. Ses yeux n'ont jamais quitté le ballon jusqu’au fond du filet. Score : 0-1.
Les Super Eagles, vexés, répliqueront, 1-1, (Obinna Nsofor, 73’) puis, 2-1, (Ikechukwu Uche, 84’) avant que le Syli ne clore la partie, 2-2, (Ibrahima Traoré, 103’).
Le football, certes, a beaucoup évolué. Mais, c’est la tactique de jeu qui permet souvent aux entraineurs d’obtenir le résultat voulu.
Dussuyer, l’expérience aidant, a profité d’une erreur tactique commise par l'entraîneur Samson Siasia. Il a révélé que le retrait de Joel Obi par Siasia a offert la marge de manœuvre à son camp, ajoutant que cela a permis à son équipe de se déplacer au milieu du terrain et d’ouvrir la défense nigériane, résultant au but d’Ibrahima Traoré dans les ultimes minutes. ’’Votre équipe est bonne mais, elle est facilement prévisible.’’ a indiqué Dussuyer aux médias nigérians après le match.
Chacune des occasions ratées de part et d’autres, a été discrètement ressentie par le coach Dussuyer. Souvent débout, observant, calme et concentré. Des attitudes qui font de lui un sportif naturellement serein. Des fois, il remuait la tête, un geste d'approbation et ''jusqu'ici tout va bien'' - mais il demandait à ses joueurs de tenir à son plan, de rester solide et de choisir les moments.
Ce triomphe du onze national est un exemple montrant qu’unis nous avancerons, divisés nous dégringolerons. Le Syli National c’est la Guinée entière qui est représentée. Espérons que cela serve de leçon à nos politiciens. C’est dans notre intérêt commun à tous.
Aller cueillir la qualification au Nigeria, se qualifier sans perdre un seul match, la discipline de l’équipe, le fond de jeu rassurant, le football collectif et plaisant, la détection de nouveaux talents et l’encouragement des joueurs expérimentés, sont des preuves que Dussuyer est capable de nous bâtir une équipe qui, si elle est bien soutenue et encadrée, pourra nous honorer partout dans le monde.
Le courage prend de nombreuses formes, que ce soit sur les altitudes d’Addis-Abeba, sous le soleil d’Abuja ou la pluie de Conakry où, en juin 2010, Dussuyer a débuté sa mission : Qualifier la Guinée à la CAN 2012 et redresser une équipe en perte d'identité.
Mission accomplie. Merci Michel. Merci Syli.
/__Moysekou
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[Salwa, Monday 11 October 2011. -KWT]
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