De ‘La Masia’ ou Mimosa, que doit apprendre la Guinée ?
’’Celui qui déplace une montagne commence
par déplacer de petites pierres.’’
[Confucius]
KUWAIT CITY ― Comme certains supporters du Syli National, il m’est très facile de lui souhaiter le palmarès de certaines sélections sans penser d'abord au labeur qu'elles ont accompli dans l’ombre pour y parvenir.
Or, la réussite d’une équipe n’est pas un combat d’un jour.
Ces dernières années, nous avons vu le Nigeria, le Cameroun, le Sénégal, le Ghana, la Côte d’Ivoire, l'Egypte...etc., créer d’excellents footballeurs sur le continent. L'Egypte a même remporté la Coupe d’Afrique des nations en succession historique, avec ses talentueux locaux. Et, depuis hier, une équipe presque locale, Chipolopolos de Zambie, est championne d’Afrique (CAN 2012). C’est-à-dire, les quatre dernières couronnes continentales ont été remportées par deux sélections essentiellement composées de joueurs évoluant en Afrique.
Tandis qu'en Guinée, année après année, nous déplorons notre manque de talents dans les grands clubs et championnats européens - se demandant où allons-nous trouver nos équivalents d’Eto’o, Drogba, Essien, Adebayor ou Yaya Touré, comme si ces braconniers laborieux poussaient sur des baobabs.
Cependant, certains joueurs africains ayant évolué dans des clubs européens utilisent le réseau de connaissance qu'ils ont développé au cours de leur carrière pour réaliser des projets utiles à domicile.
Parmi les nôtres, en espérant que la donne change, nous constatons le manque d’athlètes investisseurs ou bienveillants comme Salif Keita, Abedi Pelé, Cyril Domoraud, Patrick Vieira (Diambars), Henry Camara, Samuel Eto’o...etc., des novateurs qui, pour assurer la relève footballistique de leur patrie, ont construit des centres de formation, au mieux de leur capacité.
Ces footballeurs businessmen essayent ainsi, à travers ces centres, d’investir dans l'avenir du football africain.
Sur le continent, l’Académie Mimosifcom [d’ASEC Mimosa, Abidjan] est une référence qui a engendré de très bons joueurs comme Yaya Touré, Kolo Touré, Salomon Kalou, Gervinho, Didier Zokora, Siaka Tiéné, Aruna Dindane, Baky Koné ou Romaric. Samuel Eto'o a été formé à l’Académie Kadji Sport à Douala, avant d’intégrer les rangs du Real Madrid Castilla. Et, sept titulaires de la présente sélection ghanéenne en CAN 2012 sont sortis d’Abedi Pelé Centre, niché dans les limbes de Legon, banlieue d’Accra.
Dans le passé, certains visionnaires comme Abedi Pelé, ont tenté en vain de construire leurs centres de football en Guinée.
La bonne intention, nous dit-on, raccourcit le chemin. Mais, malheureusement, sous certains cieux, à cause de certaines conceptions, ce raccourci est souvent semé d’embuches et de virages obscurs.
Ailleurs, la suprématie actuelle de l'Espagne doit beaucoup aux fruits de ‘La Masia’, l’académie des jeunes du FC Barcelone, qui a été créé en 1979 sur la recommandation du Johann Cruyff. Trente et un an plus tard, six anciens élèves de ‘La Masia’ ont pris part à la victoire 1-0 de l'Espagne sur la Hollande en finale de la Coupe du monde 2010, en Afrique du Sud. Ironie du sort, Cruyff, l’auteur de cette idée géniale (de créer ‘La Masia’), est de nationalité hollandaise. Un an plus tard, trois anciens de ‘La Masia’ (Xavi, Andrés Iniesta et Lionel Messi) ont été retenus sur la liste restreinte de trois prétendants au titre du meilleur joueur FIFA 2011, au sommet de laquelle - après un vote serré - Messi est finalement élu.
Comme Abedi Pelé Ayew, George Oppong Weah, nombreux sont les repères du cuir rond qui considèrent la Guinée comme l’une des meilleures sources de talents footballistiques d’Afrique. Malheureusement, dans ce beau pays, presque personne ne sait encore quand et où les premiers centres de formation sportive verront le jour.
Le Syli, cependant, est devenu une véritable fierté, un cocktail de talents hyper motivés et plaisants. Dans les mois et les années à venir, il faudra sans doute compter avec lui. Mais, il serait préférable que l’envie de triompher soit appuyée par le bon planning, le professionnalisme en gestion sportive et, non par l’improvisation ou l’amateurisme.
Techniquement, nos joueurs sont prêts, mais mentalement (particulièrement ceux formés en Guinée), il y a encore des déficiences. Le mot mental ici n’est qu’une allusion à la vision futuriste, la volonté du joueur. Un élément primordial que les écoles de football plantent et arrosent dans l’esprit du gosse.
Le talent est, certes, utile. Mais, un sportif qui n’a pas de motivations se contentera forcément du minimum. Ou du pétrodollar, parfois.
Une autre situation paradoxale de notre football est l’élimination précoce des clubs en compétition continentale, avec un Syli rayonnant mais un championnat local de faible qualité. Or, plus on s’intéresse à la formation à la base, mieux c’est.
Former les talents à bas âges est comme cultiver la réussite. Il faut des années de labourage, d’entretien avant la récolte. De nombreuses années.
Cette philosophie des grandes équipes, tout comme la nécessité du Centre Salif Keita (Mali), Diambars (Sénégal), Centre Samuel Eto’o (Cameroun & Gabon), Abedi Pelé Centre (Ghana), ou Mimosa (Côte d’Ivoire), est claire : Si vous souhaitez obtenir des résultats, toujours impressionnants, vous devez investir dans vos jeunes !
Qui dit mieux ?
Moysekou
KUWAIT CITY ― Lun. 13 Fév. 2012– KW